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2 févr. 2008

Angélique



Il faut d'abord pousser le portail et traverser l'allée bordée d'hortensias l'été, de pensées en hiver et de verdure toute l'année. Ici on peut vraiment dire qu'on va chez la coiffeuse. La porte est découpée dans le verre de la vitrine qui occupe toute la largeur du petit salon. On entre de plain pied au rez-de-chaussée d'une de ces maisons réputées sans style : le pavillon de banlieue. Un porte-parapluie et trois oriflammes publicitaires pour des produits capillaires l'ornent sobrement.


L'intérieur est vert turquoise. Les fauteuils, les murs, le plafond tendu, tout est de la même couleur. Seule une discrète inscription rose indique « Hortense » sur la porte d'un étroit placard où sont rangés le balai d'un côté et les manteaux des clients de l'autre, juste derrière la caisse gaiement décorée d'un ikebana de fleurs en soie.


Ce petit édifice central cache habilement le bac, territoire des têtes hirsutes enduites de divers produits, plus ou moins odorants, ou hérissées de rouleaux à permanente.


Tout ici est petit, sobre, et dégage une impression charmante à l'image de celles qui y travaillent. La patronne s'appelle Anice. Petite et mince, blonde comme il se doit pour une personne de son âge - ça adouçit les traits - encore jeune d'apparence. Une coiffeuse oeuvre à ses côtés, souriante et efficace.


Chez Hortense, on rencontre une clientèle de quartier, peu de jeunes femmes, quelques petits enfants et des hommes qui restent le temps d'un shampoing et d'un rapide coup de tondeuse.



Et puis il y a Angélique, l'apprentie. Mais une apprentie qui sait déjà travailler, même si elle hésite encore un peu pour les coupes, car ce n'est pas ce qu'elle préfère . La technique est sa spécialité, c'est-à-dire la couleur.

Tout un art qui comprend le dosage savant des teintes entre elles, en fonction de la nature des cheveux, du volume à traiter, de la carnation de la cliente et, bien sûr, de ses desiderata qu'il faut savoir habilement orienter. Angélique est persuasive, malgré une légère timidité due à son jeune âge, surtout face à des personnes un peu autoritaires comme peuvent l'être ces femmes âgées « qui savent ce qui leur va » et à qui on ne la fait pas.


Elle a commencé à quatorze ans par les shampoings et le balayage du salon, le nettoyage des ustensiles des collègues. Bref, elle a appris à servir avant d'apprendre à coiffer. La clientèle est une engeance difficile qu'il faut savoir écouter et diriger tout à la fois.


Aujourd'hui, elle rayonne. J'ai oublié de lui demander. Alors c'est elle qui m'interroge :
- Qu'est-ce que vous pensez si quelqu'un vient d'avoir un diplôme et veut encore continuer à se former ?

- C'est quelqu'un qui n'a pas envie de commencer à travailler peut-être ?

- Mais non, je travaille déjà. C'est moi !

Et elle éclate de rire.


Je me répands en excuses, la félicite pour son succès au CAP. Elle est donc maintenant une professionnelle reconnue. Elle m'informe alors qu'elle quitte le salon de coiffure pour apprendre l'esthétique. « Le maquillage », me précise-t-elle avec un petit sourire rêveur.

- Redevenir une apprentie, celle qui ne sait pas, à qui on demande le boulot que les autres n'aiment pas faire, ça ne vous fait pas peur ?

- Oui mais je vais apprendre ! Et puis de transformer les clientes, les voir sortir souriantes toutes pomponnées, ça me plaît. Oui je crois bien que ça va me plaire.

Charmante Angélique, déjà dans son nouveau rôle, prête à satisfaire les plus exigeantes !

Qui désormais va mélanger les teintes pour trouver exactement la couleur qui me convient ?


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