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6 sept. 2007

Lecture pour crépitophiles



Je réitère un sujet trop décrié par le puritaniqme ambiant et croissant dans notre société qui fait pourtant quotidiennement la part belle à l'obscénité, bizarrement tolérée par les bégueules en tout genre. Mon intérêt pour ces amusantes oeuvres de l'esprit, qui font la part belle aux mouvements du corps, n'ont rien à voir avec un amour particulier pour la scatologie, mais plutôt avec le plaisir de retrouver la liberté d'esprit et l'amour du rire de nos plus grands philosophes et poètes, dans lesquels nombre de nos contemporains devraient puiser.



L'éditeur du rare fascicule conservé à la bibliothèque de Lisieux présente « au lecteur bénévole et sans préjugés » un poème en deux cent quarante vers trouvé à la suite du calendrier de l'année 1783, pastiche de l'Art poétique de Nicolas Boileau l'Art de péter, « réimprimé pour l'esbattement du petit nombre de pantagruélistes modernes qui ont conservé le goût de nos aïeux pour certains racontars de haulte graisse.



Ce goût « si vivace encore aujourd'hui dans les campagnes, n'a pas complètement abandonné les grandes villes, où les histoires scatologiques ont conservé le privilège d'exciter une innocente gaîté. Je dis à dessein une innocente gaîté : il ne faut pas, en effet, mettre sur la même ligne les images sales et les images obscènes. Celles-ci doivent être proscrites parce qu'elles sont dangereuses. Les autres sont exemptes d'inconvénient, parce qu'elles ne peuvent pas produire le moindre désordre, provoquer le moindre excès ».

Les crépitophiles d'aujourd'hui n'éprouveront pas moins une satisfaction réelle à cette lecture.

Au plaisir philosophique de l'Eloge du Pet par Mercier de Compiègne, on savourera l'art poétique de l'auteur resté inconnu.

Voici la première strophe de chacun des poèmes, qui montrent bien, sinon l'art de péter, celui de versifier.








Vous, qui lisez cet Ouvrage,
Savourez-en le fumet :
Ce Livre à plus d'un usage
Peut servir au Cabinet ;
S'il déplait par sa matière,
Torchez-vous en le derrière :
M'en pendrai-je ? Hélas! Non, vraiment ;
Autant en emporte le vent.





L'ART POÉTIQUE

Chant 1

Nicolas Boileau

C'est en vain qu'au Parnasse un téméraire auteur
Pense de l'art des vers atteindre la hauteur.
S'il ne sent point du Ciel l'influence secrète,
Si son astre en naissant ne l'a formé poète,
Dans son génie étroit il est toujours captif ;
Pour lui Phébus est sourd, et Pégase est rétif.
Ô vous donc qui, brûlant d'une ardeur périlleuse,
Courez du bel esprit, la carrière épineuse,
N'allez pas sur des vers sans fruit vous consumer,
Ni prendre pour génie un amour de rimer ;
Craignez d'un vain plaisir les trompeuses amorces,
Et consultez longtemps votre esprit et vos forces.
La nature, fertile en Esprits excellents,
Sait entre les Auteurs partager les talents.

L'ART DE PÉTER
POÈME



C’est en vain, cher ami, qu'un débile péteur
Croit de l'art de péter atteindre la hauteur,
S'il n'éprouve en son ventre une guerre secrète,
S'il ne sait par le bas tirer de l'arbalète,
Dans ses boyaux gonflés te vent reste captif ;
Pour lui Nature est sourde et son cul est poussif.
O vous donc, qui, sentant une ardeur chatouilleuse,
Courez des Francs-Péteurs la carrière merdeuse,
N'allez pas par des vents vous laisser consumer,
Ni prendre pour talent le simple Art de vesser.
Craignez d'un vent foireux les trompeuses délices ;
Il voiture avec lui de berneuses épices.
La Nature stérile en Péteurs excellents
Sçait entre les Souffleurs partager les talents.




Nicolas Boileau, L'art poétique

Bibliothèque de Lisieux, l'Art de péter


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